Le nouveau président congolais, Félix Tshisekedi, devra batailler pour mieux gérer les ressources en minerais qui représentent 80 % des revenus de l’Etat. Analyse.
Jeudi 24 janvier, une scène politique historique est survenue au cœur de l’Afrique qui devrait faire son effet sur l’économie globale. Elle s’est déroulée dans la mégapole déglinguée de Kinshasa plutôt qu’à Davos (Suisse) où se tient en ce moment le Forum économique mondial. Accroché à la présidence depuis la fin de son dernier mandat constitutionnel en décembre 2016, Joseph Kabila, 47 ans, a transmis le pouvoir « sans regret ni remords » à l’opposant avec qui il a pactisé, Félix Tshisekedi.
A 55 ans, ce dernier devient le cinquième président de la République démocratique du Congo (RDC), le pays le plus vaste d’Afrique subsaharienne, mais aussi le plus riche en ressources minières, regorgeant notamment de cobalt, dont dépend la révolution en cours des véhicules électriques. Ce qui vaut à la RDC, premier producteur et exportateur de ce minerai, d’être si convoitée, surveillée, commentée par la dite communauté internationale. Voilà un pays, théâtre de plusieurs conflits permanents, dont dépend en partie le développement technologique mondial mais sur lequel nul n’a véritablement d’emprise.
Emprise politique
« Nous félicitons M. Tshisekedi et nous saluons le peuple de la RDC pour son insistance pour un transfert de pouvoir pacifique et démocratique. » Cette déclaration très officielle n’émane pas d’un chef d’Etat ou d’une organisation internationale qui ont tous fini par « saluer » ou « prendre acte » de cette victoire contestée à l’élection présidentielle du 30 décembre 2018. Elle est signée Ivanhoe Mines, une compagnie minière canadienne qui développe un immense gisement de cuivre non loin de Kolwezi (province de Lualaba, sud-est), en partenariat avec une société chinoise et le gouvernement congolais. Un tel communiqué, décrétant le jour de l’investiture du nouveau président que « c’est une période de formidables opportunités », rappelle le lien ténu entre politique et business. En RDC, une multinationale minière peut se révéler plus dangereuse et nuisible pour le pouvoir que la centaine de petits groupes armés recensée dans les Kivus (est).
En cette fin de règne, M. Kabila a craint une déstabilisation politique fourbie par ces mastodontes du secteur minier ou du négoce de matières premières, comme Glencore, dont le chiffre d’affaires est vingt-cinq fois supérieur au budget de l’Etat congolais (5,9 milliards de dollars, en 2019). Après s’être considérablement enrichi, tout comme sa famille et certains de ses proches conseillers, M. Kabila a fait promulguer en mars 2018 le nouveau Code minier rehaussant la redevance de 2 % à 10 % sur le cobalt et le cuivre, notamment. « En 2019, on va, à nouveau, multiplier par deux ou par trois nos redevances », a annoncé M. Kabila, fin décembre 2018, au Monde, confiant avoir reçu des « menaces de mort ». Son successeur, parviendra-t-il à maintenir le rapport de forces avec ces opérateurs économiques prêts à tout pour exploiter les intarissables ressources naturelles congolaises ?
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